
À peine nommé, le nouveau Premier ministre est déjà sous pression, victime des mêmes urgences qui minent ce poste depuis deux ans.
Sébastien Lecornu est-il l’homme de la situation ? La question taraude les esprits depuis la révélation du nom de l’ancien ministre des Armées comme nouveau Premier ministre mardi 9 septembre, en remplacement de François Bayrou, qui aura tenu environ neuf mois au poste.
C’est quatre fois plus de temps que celui passé par Michel Barnier à Matignon, et un mois de plus que la durée du séjour de son prédécesseur, Gabriel Attal. Cela reste néanmoins inférieur à la durée du mandat d’Élisabeth Borne, cheffe du gouvernement pendant un an et sept mois.
C’était bien avant que la dissolution de l’Assemblée nationale du 9 juin 2024 n’ouvre un cycle d’incertitude inédite au sommet de l’exécutif français, transformant Matignon en véritable siège éjectable pour ses occupants. Dans ce contexte, Lecornu marche sur une corde raide.
« Je pense que j’ai été clair en donnant le cadre, maintenant il faut que les concertations aient lieu« , a-t-il déclaré lors de son premier déplacement après sa nomination, évoquant une volonté de « fonctionner différemment » et promettant une « rupture » avec les huit dernières années.
Une mission quasi impossible ?
Ce positionnement pose toutefois question, d’autant que celui qui invoque la rupture compte parmi les plus proches collaborateurs du président de la République Emmanuel Macron. L’Élysée le décrit d’ailleurs comme un « ministre de grande confiance ».
« Il va essayer de changer de forme sur la méthode. Pourquoi ? Parce que sur le fond, il n’a pas grand-chose à changer« , analyse Marine Tondelier, secrétaire nationale d’Europe Écologie-Les Verts, alors que d’aucuns s’interrogent sur l’effectivité des changements annoncés.
Avec un Rassemblement national (RN) qui n’attend qu’une dissolution de l’Assemblée nationale et La France insoumise (LFI) qui réclame une destitution du président, la seule issue demeure un compromis avec la gauche non-mélenchoniste, selon le journaliste Patrick Cohen.
D’autant que Macron exclut ces deux options, d’après Le Parisien. Cette mission, qui consiste à éviter qu’une majorité d’opposants ne se dresse contre lui à l’Assemblée nationale, nécessite de parler aux socialistes, communistes, écologistes et députés du groupe Liot, tout en évitant de faire fuir la droite républicaine.
L’homme de la dernière chance ?
Ce cahier des charges préfigure de négociations sous tension avec les oppositions. « Lecornu, c’est la dernière cartouche. S’il est renversé, je ne vois pas comment on se relève », confie un conseiller présidentiel au Parisien.
« C’est le gouvernement de la dernière chance. Si ça ne marche pas avec lui, la pression pour retourner aux urnes va être extrêmement forte et ce serait létal », abonde un ancien ministre macroniste, même si d’autres tentent de dédramatiser.
« Un président est là pour présider, un Premier ministre pour sauter », résume un autre proche de Macron, dans une formule qui illustre le destin précaire du poste de Premier ministre ces deux dernières années.