En privant Manchester City de compétitions européennes pendant deux années, l’UEFA envoie un message fort à tous les clubs riches du Vieux continent habitués à passer outre le fair-play financier. Mais la sanction sera-t-elle suffisante pour remettre en cause l’ordre économique actuel et mettre fin aux mauvaises pratiques ?
Manchester City a beaucoup à perdre
L’annonce a fait l’effet d’une bombe. Vendredi dernier, l’UEFA a décidé de retirer Manchester City de toutes compétitions européennes, pour les deux prochaines saisons, après de « graves violations » des règles du fair-play financier (FFP). Cette sanction est accompagnée d’une amende de 30 millions d’euros.
Tant sportivement qu’économiquement, la décision semble très inquiétante pour City. Le club devrait se passer de la manne financière de la Ligue des champions, estimée entre 50 et 100 millions d’euros par an. Et faire sans la visibilité, la réputation et la médiatisation de la compétition. Ses joueurs et ses sponsors pourraient partir également, plutôt que de rester au sein d’une équipe qui ne jouera plus l’Europe. L’entraineur Pep Guardiola, lui, a déjà dit qu’il restera au club, même si les sanctions se confirmaient.
Manchester City peut en effet encore faire appel en saisissant le Tribunal arbitral du sport (TAS), selon la déclaration de l’UEFA. Chose que les dirigeants se sont empressés de faire. Une décision devrait ainsi être prise dans les prochains mois.
Manchester City peut contraindre l’UEFA à revoir sa réglementation
Pour sa défense, le club anglais peut prouver la bonne gestion de ses comptes et l’absence de toute fraude, ou alors, comme le suppose un récent article du Financial Times, attaquer directement le principe même du fair-play financier. Auquel cas, il parviendrait peut-être à remettre en cause le règlement comptable européen auprès du Tribunal arbitral du sport.
D’après Daniel Geey, avocat en droit du sport, interrogé par le Financial Times, « si Man City avance un argument selon lequel la FFP est anticoncurrentielle, qu’elle est une contrainte injuste pour les clubs, et que le TAS est d’accord avec cela, l’UEFA devra revoir toute sa réglementation. Cela pourrait être une révolution dans la sphère du football européen ».
Le TAS a la légitimité pour imposer une nouvelle jurisprudence auprès d’une juridiction comme l’UEFA.
La fin des clubs-Etats ?
Si au contraire l’UEFA remportait ce « procès », ce serait la victoire de l’équité sportive tant souhaitée par les plus petits clubs. Cette victoire couperait l’herbe aux pieds des clubs riches qui sont régulièrement en infraction avec les règles du fair-play financier (souvenons-nous, le PSG a failli être aussi épinglé). Une partie essentielle de leurs revenus proviennent de contrats de sponsoring surévalués avec des entités liées aux propriétaires des clubs – plus ou moins directement les États-actionnaires du Qatar et d’Abou Dhabi. Ce qui suscite de nombreuses questions sur la libéralisation débridée du football. Par exemple : fallait-il laisser des Etats posséder des clubs de football ?