Alors que la France voit sa natalité s’effondrer année après année, un phénomène social persiste : la stigmatisation des familles avec enfant unique.
Les témoignages assez éloquents recueillis par Le Monde, renseignent à suffisance sur la presse sociale à laquelle sont confrontés les parents à un seul enfant en France. Que ce soit par simple choix personnel ou par diverses contraintes, le phénomène des enfants uniques est répandu dans le pays.
Le quotidien du soir estime à 20%, le nombre de femmes aujourd’hui concernées. Ce chiffre, relativement stable – il était de 18% au début des années 2000 selon l’Institut national d’études démographiques (INED) – reflète pourtant une réalité persistante : le regard souvent désapprobateur de l’entourage face à ce choix familial, d’après Didier Breton, professeur de démographie à la faculté des sciences sociales de l’université de Strasbourg, interrogé par Le Monde.
« Chez nos voisins européens, où une telle pression est moindre, ces femmes n’auraient peut-être pas eu d’enfant », avance ce dernier également chercheur associé à l’INED, voyant à travers cette injonction à une seconde maternité, une spécificité française.
En effet, le modèle de la famille à deux enfants minimum apparaît comme profondément ancré dans l’imaginaire collectif en France.
Une pression aux impacts méconnus
Sophie, restauratrice de tableaux en Gironde, en a ainsi fait l’expérience dès la première semaine suivant son accouchement, lorsque son père lui a lancé selon des propos cités par Le Monde : « Il faudra penser à faire le deuxième, parce que, dans une voiture, il y a quatre places ! »
« Si on y réfléchit, on a tout entendu« , confie pour sa part Anaïs Renaud, aide à domicile de 46 ans et mère d’une fillette de 9 ans. Elle parle de diverses remarques souvent plus dégradantes les unes que les autres, attachées à sa progéniture. Cela va de l’enfant malheureux ou égoïste à l’enfant-roi…
Une tante lui aurait même dit : « Et si vous mourez, tu as pensé à elle ? » Ces propos apparemment anodins, mais révélateurs de la force des conventions sociales, sont d’autant plus criants que le contexte semble s’y prêter.
L’art du bonheur à trois
Selon le dernier bilan démographique de l’Insee publié le 14 janvier 2025, le nombre de naissances en France a encore reculé de 2,2% en 2024, avec seulement 663 000 nouveaux-nés enregistrés. Une baisse vertigineuse de plus de 21% par rapport au pic de 2010.
Même si l’Hexagone reste le territoire le plus fécond de l’Union européenne (UE) avec 1,62 enfant par femme, contre 1,4 en moyenne au sein de l’UE. Derrière les préjugés se cachent pourtant une réalité plus nuancée.
Les parents interrogés témoignent d’une relation privilégiée avec leur enfant unique, faite de temps partagé et d’attention exclusive. Ils décrivent des enfants élevés dans des foyers plus ouverts aux amis et aux interactions sociales.
« Avoir un seul enfant, c’est presque une pub pour donner aux autres l’envie d’en faire« , s’amuse Thibaut Fraix-Burnet, père séparé de 42 ans.