
Cette disposition juridique inscrite dans le Code pénal fait l’objet de vives contestations depuis qu’elle a été prononcée contre Marine Le Pen dans l’affaire des assistants parlementaires de son parti, le Rassemblement national.
L’exécution provisoire des peines d’inéligibilité sera-t-elle supprimée ? C’est une question cruciale qui agite la classe politique française depuis quelques jours, particulièrement depuis que la présidente du Rassemblement national (RN) en a fait les frais.
Reconnue coupable de détournement de fonds européens dans l’affaire des « faux » assistants parlementaires impliquant son parti entre 2004 et 2016, la députée du Pas-de-Calais a été condamnée lundi 31 mars 2025 à quatre ans de prison, dont deux ans avec sursis, à purger sous surveillance électronique.
Elle écope également d’une peine de cinq ans d’inéligibilité avec « exécution provisoire ». Cette disposition la prive de fait d’une participation à toute élection, même en cas d’appel de la décision judiciaire.
C’est une mesure relativement rare et surtout à l’opposé du principe général selon lequel une condamnation pénale n’entre en vigueur qu’une fois devenue définitive. C’est-à-dire lorsque toutes les voies de recours ont été épuisées.
Une véritable polémique nationale
À moins de deux ans de la présidentielle 2027, la perspective d’une Marine Le Pen hors course suscite des tensions au sein de la classe politique. À tel point que certains envisagent de revenir sur cette exécution provisoire des peines d’inéligibilité à travers une nouvelle réforme du Code pénal.
La controverse s’est amplifiée après que le Premier ministre François Bayrou a déclaré mardi 1er avril être ouvert à une « réflexion » sur le sujet, même s’il a dû préciser sa position le lendemain face aux remous, déclarant qu’il revient au parlement de se saisir du sujet.
Le Parisien indique à cet effet qu’une proposition de loi est d’ores et déjà en cours de rédaction sur la question à l’initiative du député Eric Ciotti, président du groupe parlementaire UDR.
Mais l’initiative est loin de faire l’unanimité au sein de l’hémicycle, comme le journal francilien a pu le constater au détour de quelques réactions recueillies auprès des parlementaires.
Des textes de lois sur mesure ?
Au sein du groupe LR, les positions sont nuancées. Le député Antoine Vermorel confie s’interroger encore, quand son collègue Vincent Jeanbrun se montre réticent. « On ne va pas voter une loi en réaction à la condamnation de Marine Le Pen. Le sentiment que l’on change la loi quand elle ne convient pas aux politiques, cela renvoie une image délétère. La justice est la même pour tous, que l’on soit faible ou puissant« , tranche-t-il.
Du côté du groupe Ensemble pour La République où l’opposition au texte semble quasi-unanime. « Ne soyons pas dupes, cette proposition de loi a pour unique but d’arranger les affaires de Madame Le Pen« , affirme Maud Bregeon, ex-porte-parole du gouvernement Barnier.
Les socialistes, qui avaient porté la réforme de l’exécution provisoire des peines d’inéligibilité en 2016 sous la présidence Hollande, s’opposent également à sa remise en cause. Au vu de la propension prise par ce débat, il faut se demander si la tentation de s’arranger avec les lois ne risque pas de s’emparer du palais Bourbon.