Opiniatre 27 novembre 2019

La situation sécuritaire au Mali se dégrade de jour en jour. Pas une semaine sans attaques meurtrières, visant notamment les forces de sécurité gouvernementales. Pire, le soutien aux djihadistes progresse auprès des populations dans de nombreuses parties du territoire national en raison de la misère endémique qui frappe les couches populaires et de la passivité du gouvernement à prendre la mesure des défis à relever.

Ce n’est pas par fanatisme que les communautés rurales du centre et du nord du Mali rejoignent massivement les rangs des groupes armés djihadistes. C’est la misère et le désespoir qui font de ces communautés des alliés des terroristes et de la chair à canon pour détruire la souveraineté nationale du Mali. Il n’y a pas de radicalisation religieuse dans les campagnes maliennes : juste l’instinct de survie.

Ces populations rurales n’ont pas vu depuis des années le moindre représentant du gouvernement de Bamako, se retrouvent pris entre deux feux dans une guerre où elles n’ont rien à gagner, et voient dans les troupes djihadistes les seules groupes armés en mesure de les protéger. Des djihadistes qui prennent également le relai du gouvernement dans ses missions sociales en distribuant de l’argent, de l’eau potable, voire des médicaments.

La nature a horreur du vide et les groupes terroristes affiliés à Al-Qaida n’ont fait que prendre la place que n’occupaient plus depuis longtemps les autorités maliennes. Si la crise économique et sociale frappe l’ensemble du pays, le nord et le centre du Mali ont été laissé en friche et sous-administré depuis des décennies. Hôpitaux, écoles, police, administration : la présence de Bamako s’est progressivement relâchée sur ces vastes territoires déjà enclavés par le désert.

Et, alors que cette tendance aurait dû être combattue et inversée depuis le début de la crise, le gouvernement du président Ibrahim Boubacar Keïta n’a jamais rien tenté pour reprendre le contrôle du nord et du centre. Pire, il s’agit désormais de territoires abandonnés que les groupes armés djihadistes se sont fait un plaisir de saisir. Et qu’ils contrôlent désormais très largement.

Aucune réponse sécuritaire, que ce soit l’armée malienne ou l’armée française, ne peut ramener l’ordre dans ces régions quand les terroristes ont gagné l’affection et l’allégeance des populations. Chaque habitant, même s’il n’a aucune affinité pour les terroristes, est un espion potentiel tant qu’il pense que ce sont ces derniers qui peuvent le protéger efficacement et lui apporter les services sociaux de base.

C’est donc une reconquête économique et sociale que doit réaliser le gouvernement malien et ses alliés s’ils souhaitent reprendre pied dans le nord et le centre du pays. Une reconquête demandée à corps et à cris par un certain nombre de figures de l’opposition, à commencer par Aliou Boubacar Diallo (ADP-Maliba), qui réclame la mise en place d’un véritable plan Marshall de 15’000 milliards de francs CFA (23 milliards d’euros) pour reprendre la main.

Il apparait en effet de plus en plus futile d’espérer gagner la guerre contre la terreur au Mali sans prendre en compte les réalités sociales des zones où le cancer terroriste métastase.

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